Séminaire du 12 février 2014

LE GÈNE DANS TOUS SES ÉTATS
Intervenantes : Anne CAMBON-THOMSEN et Dominique STOPPA-LYONNET

La notion de gène, comme objet d’un discours scientifique, date d’à peine plus d’un siècle, mais est largement diffusée dans la société.  A vendre, patrimoine privé, patrimoine de l’humanité, marqueurs de notre identité en tant qu’humain, prédicteur de notre avenir social, de notre santé, bon ou mauvais, le gène fait l’objet de nombreux débats associant scientifiques, philosophes, éthiciens, mais aussi les citoyens.

Pour en parler, nous aurons :

Anne CAMBON-THOMSEN, Directrice de recherche au CNRS, Inserm, Université Toulouse III – Paul Sabatier

Le génome, Janus de la biologie, entre patrimoine et individu.
Présentation de A. Cambon-Thomsen

Résumé :
La déclaration universelle de l’UNESCO sur le génome humain et les droits de l’homme (1997) a ainsi libellé son article premier :  « Le génome humain sous-tend l’unité fondamentale de tous les membres de la famille humaine, ainsi que la reconnaissance de leur dignité intrinsèque et de leur diversité. Dans un sens symbolique, il est le patrimoine de l’humanité. »  C’est aussi une des caractéristiques du génome d’être un marqueur d’identité biologique individuelle et les empreintes génétiques sont utilisées depuis de nombreuses années  dans le domaine judiciaire à visée d’identification.  Evoquant  Janus, avec ses deux faces,   le génome est ainsi à la fois l’élément biologique  le plus partagé (symboliquement patrimoine commun; on ne le modifie pas…) et l’élément le plus personnel (unicité, identité).  Une autre double dimension du génome se décline en considérant l’information génétique qui le sous-tend : avons-nous à faire à un élément du corps humain ou à une « information » ? Si le système juridique n’utilise pas le même arsenal de règles pour le corps et ses éléments et pour l’information à caractère personnel quand considère-t-on le génome comme un élément du corps humain et quand comme une information ?  Quel est le statut de cette information  dans la société ? Nous examinerons  en quoi l’évolution des technologies d’étude du génome,  les modalités changeantes de la production, maintenant massive, d’information génétique   et les conditions de son accès, de sa circulation et de ses utilisations éclairent ces diverses facettes.

Dominique STOPPA-LYONNET, Chef du Service de Génétique de l’Institut Curie ; Professeur de Génétique Médicale à l’Université Paris Descartes
 
De la révocation par l’Office Européen des Brevets sur le gène BRCA1 à la décision de la Cour Suprême Américaine de non brevetabilité des génomes.
Présentation de D. Stoppa-Lyonnet

Résumé :
Nous parcourrons la saga des brevets sur le gène BRCA1. Nous verrons comment la revendication par la société Myriad Genetics du monopole des tests BRCA1 et BRCA2 a conduit en septembre 2001 les laboratoires européens académiques à s’y opposer, dénonçant leur qualité insuffisante, leur coût exorbitant et l’impact négatif du monopole sur leur optimisation tant technique qu’analytique. Nous verrons la décision de mars 2010 du juge fédéral Robert Sweet, jugeant non brevetables les gènes BRCA1 et BRCA2 ainsi que leur analyse, décision préfigurant celle de la Cour Suprême de juin 2013 portant sur tous les génomes. Nous verrons en quoi cette décision était devenue indispensable avec l’avènement du séquençage très haut débit tendant au séquençage de nos 25 000 gènes plutôt qu’à celui d’un ou de quelques gènes.

Animatrice de la séance : Annick JACQ, directrice du Centre d’Alembert

Questions du public